Toutes soeurs ?

Ce n'est pas une découverte, les femmes ne constituent pas une catégorie homogène. Elle sont porteuses de valeurs qui sont parfois contradictoires, voire violemment antagonistes en ce qui concerne la place des femmes dans la société, l'homosexualité, l'éducation des filles...
Le terme "femmes" renvoie à une classe de sexe au sens où l'a définie Monique Wittig, c'est-à-dire à une construction sociale qui est opérante pour distinguer masculin et féminin. Bien sûr, on peut interroger la façon dont sont construites ces catégories dans chaque société humaine, ce qui fait apparaître leur caractère relatif. Elles varient suivant les époques à l'intérieur d'une même culture et diffèrent aussi d'une culture à l'autre. 

On comprend bien alors que le groupe "femmes" est défini d'abord par le regard de l'autre, qui vous assigne à la catégorie femmes. L'appellation "femmes" ou "hommes" d'ailleurs, n'émane pas des membres du groupe que l' "on" désigne ainsi. Avant de se revendiquer, de se reconnaître comme appartenant à la catégorie "femme", cela suppose d'abord de s'approprier cette catégorie un peu fourre-tout et d'y trouver des modèles auxquels si'dentifier pour se construire. Comme l'a dit Simone de Beauvoir, "on ne naît pas femme, on le devient".

Mais qu'en dit le sujet ? La personne assignée à la catégorie "femme" peut ne pas s'identifier du tout à cette catégorie, ou s'identifier à certains modèles qui sont rattachés à cette catégorie: la "femme féminine" ou la femme maculine" pour prendre deux exemples. Ces modèles se déclinent eux-mêmes en de multiples variations. Ils véhiculent des valeurs qui renvoient à des normes sociales.
En effet, la société produit du discours normatif sur ces modèles, les "femmes féminines" restent globalement plus valorisées que les "femmes masculines". Le jugement sera péjoratif pour les deuxièmes. Les choses évoluent heureusement et la mode notamment en témoigne.

Regardons maintenant les normes sociales qui s'appliquent aux femmes dans le champ de la sexualité. On a globalement un spectre qui s'étend de la "mère de famille", construction sociale de la femme monogamme, hétérosexuelle, procréatrice, dont la sexualité est éventuellement encadrée par un contrat social (mariage, pacs) inscrivant la filiation et la transmission des biens; à la prostituée, figure archétypale renvoyant à une sexualité polygamme (polyandre plus justement), hétérosexuelle, sans procréation, non encadrée par un contrat.    

Là encore le regard social, le jugement que les autres portent sur votre sexualité, hétérosexualité, bisexualité, homosexualité, votre choix de partenaire(s) est connoté plus ou moins positivement.   
Au sein du groupe "femmes" vont ainsi s'exprimer des choix sexuels qui peuvent être très divers, des plus "normés" aux plus "transgressifs".

Si l'on revient à cette classe de sexe qui s'appelle "femmes", force est de constater qu'elle ne possède aucune cohérence interne. Elle renvoie à des expériences sociales de l"être femme" très variables qui n'ont finalement d'autre dénominateur commun que celui d'être le fait de personnes appartenant au groupe "femmes". C'est bien peu en réalité!
D'autres élements constitutifs de l'identité sont bien plus pregnants : l'adhésion aux normes/valeurs véhiculées par des discours politiques, religieux, philosophiques, artistiques...

De fait des femmes sont en conflit ouvert avec d'autres femmes sur des questions sociétales comme l'avortement par exemple. La sexualité des adolescentes et l'accès à la contraception ne font pas non plus l'unanimité.
Combien de jeunes filles se trouvent sous le joug de femmes plus âgées qui contrôlent leur sexualité, prêtant main forte au patriarcat?
On pourra les dire elles-mêmes victimes d'un système qui les dépasse. Je reste pour ma part persuadée que leur appartenance au groupe "femmes" ne crée aucune solidarité en soi.

Camille pour VEF. 

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